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Enseignants : comment construire ses progressions annuelles en mathématiques ?

Des fractions, une pincée d’arithmétique, deux larmes de calcul littéral, un morceau de fonctions, une cuillère de proportionnalité ; découper tout ça en curriculaire, et le disposer en spiralé ; saupoudrer avec de l’espace et du calcul en ligne tout au long de l’année… Et ça donne une progression bien cuite. Ah, j’ai zappé la géométrie, c’est dégueu… Bon, un petit post pour les enseignants au sujet des progressions annuelles en mathématiques.

 « Je connais mes niveaux de classe depuis hier et je commence les cours demain. Je dois faire des progressions sur l’année en plus de préparer ma première séquence… C’est quoi ce b** ! »

En début de carrière, on ne connaît en général les classes qui nous seront attribuées qu’au dernier moment, quelques jours – quelques heures ? – avant la rentrée. Pourtant, une année d’enseignement s’organise, il est indispensable de fixer avant le début de l’année l’ordre dans lequel on va enseigner les notions au programme. Dans le jargon du métier, la liste chronologique des séquences à enseigner pour un niveau de classe donné s’appelle « progression ».

Je te propose deux points à discuter :

1.       Quelle progression suivre quand on débute ?

2.       Comment élaborer une progression, quand on connaît ses classes et ses collègues en avance ?

 

1.       Quelle progression suivre quand on débute en tant qu'enseignant de mathématiques ?

Ce n’est pas une mince affaire de préparer une progression quand on débute, mais, bien souvent, elle est déjà construite. Dans les établissements scolaires, les équipes de maths de collège et lycée suivent en général des progressions communes qu’elles ont elles-mêmes élaborées. Un petit conseil : il est préférable de suivre la progression de ton équipe plutôt que de suivre ta progression personnelle ; disons dans 99% des cas. Même si le caractère spiralée de la progression de tes collègues te donne le tournis ou que les longs tunnels promis par une progression qui ne comporte que 9 séquences déclenche ta claustrophobie, il reste décisif de partager une même progression. Sinon, l’année suivante, tes collègues et toi écoperont de classes qui n’auront pas les mêmes connaissances en tête. Et ça, c’est vraiment pénible…

« Oui, mais ça crée de la diversité, et… »

Non, c’est juste difficile à gérer. Je te recommande de toujours te demander si l’idée lumineuse qui te fais suivre une progression différente de celle de ton équipe en vaut la chandelle.

« Ok, ok, du calme, j’ai compris, ça énervera les collègues si je fais ça. »

Oui, mais il y a bien sûr des solutions intermédiaires : en guise de progression, il est possible de se donner des balises : par exemple, à la fin du premier trimestre, l'équipe de maths doit avoir enseigner une certaine liste de séquences, quel que soit l’ordre choisi. Enfin, tu vois l’idée.

« D'accord, mais mes collègues me disent qu’ils ne suivent pas de progression commune. »

Là, c’est plus embêtant. Ce sera à toi d’impulser ça en fin d’année, mais pour l’instant, si tu débutes dans le métier, le temps presse. Je te conseille de reprendre une progression d'un de tes collègues, et si ce n’est pas si simple, reprends-en une d’un manuel ou d’internet (en étant vigilant sur la qualité de ce que tu trouves sur internet bien sûr). Tu trouveras les progressions que mes collègues et moi utilisons en suivant le lien suivant : https://www.mathscours.com/espace-enseignants N’hésite pas à les repiquer.

« Sinon, je fais ma propre progression… »

Bof, si c’est ta première année ou ta seconde année d’enseignement, c’est un gros risque, tu n’as pas une connaissance précise des contenus à enseigner et tu tomberas dans de nombreux pièges relatifs à l’ordre des notions à aborder. Je te recommande vivement d’en choisir une élaborée par des enseignants expérimentés pour ton début de carrière. Tu la mettras à ta main petit à petit.

 

2.       Quelles sont les étapes pour construire une progression (quand on connaît ses classes et ses collègues en avance !) ?

Réussir une progression requiert de structurer les contenus de programme de manière logique, équilibrée et rythmée sur une année scolaire, tout en ayant pris en compte les connaissances effectives acquises antérieurement par les élèves. Voici les 4 étapes à suivre pour être – me semble-t-il – efficace :

·       1re étape : Construire la progression en équipe

·       2de étape : Lister les objectifs d’apprentissage par chapitre

·       3e étape : Dresser la liste des séquences et décider des objectifs d’apprentissage retenus pour le niveau de classe considéré

·       4e étape : Attribuer une durée aux séquences

 

1re étape : Construire la progression en équipe

Une progression qui remplit ses objectifs est le fruit d’un travail collectif de la part de l’équipe de maths. En général, les équipes se réunissent en juin, en conseil d’enseignement, et font le tour de leurs progressions de l’année.

« Je ne vois pas l’intérêt, il suffit de prendre une progression dans un manuel, elles sont bien faites… »

Élaborer des progressions se fait certainement en fonction des programmes, mais également selon des élèves que l’on a eus en face de soi pendant un an. En modifiant les progression d’une année sur l’autre, l’équipe de maths rééquilibrent les grandes masses grâce aux difficultés éprouvées par les élèves qu’elles ont diagnostiquées. Par exemple, si on sent que le chapitre de géométrie dans l’espace de 4e est difficile à enseigner, c'est peut-être qu'il demande aux collègues de 4e de revoir beaucoup de notions antérieures avec leurs élèves. Il est alors pertinent d’adapter la progression de 5e et peut-être de 6e. Pourquoi pas mettre cette séquence en tout début d’année par exemple plutôt qu’à la fin ? Pourquoi pas ajouter une semaine sur l’année à la géométrie dans l’espace et partager ce chapitre en deux séquences, en éloignant leur enseignement de plusieurs moins afin de favoriser la mémorisation ? Par ailleurs, les élèves de 3e ne seront probablement pas d’aplomb en géométrie dans l’espace, il faudra ainsi adapter également la progression de 3e.

« Mais, si tu ajoutes une semaine à un chapitre, tu la retires ailleurs… »

Oui, c’est pour ça que l’élaboration de progression est un jeu d’équilibriste. Et les équipes stables te le diront : si une progression est modifiée pour les élèves de l'année n+1, les élèves de l’année n+1 n’auront pas les mêmes connaissances que les élèves de l’année n. C’est le but, mais c’est aussi le risque : si tu renforces la géométrie dans l’espace, tu retires peut-être du calcul littéral. C’est pour ça qu’il est essentiel d’élaborer collectivement les progressions, ce ne sont pas des arbitrages à prendre à la légère.

« Bon ok, on la joue collectif, mais il y a une méthode pour élaborer des progressions ? »

Ça nous amène à la seconde étape.

2de étape : Lister les objectifs d’apprentissage par chapitre

Par objectif d’apprentissage, j’entends « savoir trouver une longueur de côté de triangle rectangle en utilisant le théorème de Pythagore » ou encore « savoir additionner et soustraire deux fractions dont le dénominateur de l’une n’est pas un multiple du dénominateur de l’autre »… Et par chapitre, j’entends « grand thème ». Par exemples : trigonométrie, fonctions, calcul littéral, géométrie dans le plan, géométrie dans l'espace… Un chapitre peut constituer une séquence d’enseignement (unité de référence de la progression) ou être partagé en plusieurs séquences. Enfin, ne vous faites pas une religion de la distinction que je propose entre chapitre et séquence, hein, elle est probablement très perso. Pas sûre d'ailleurs que la distinction soit stabilisée.

On a dit qu’une progression était une liste de séquences chronologiquement organisée. Certes, mais il s’agit de détailler un peu, ce qui va compliquer le travail. Pour pouvoir élaborer une progression, il s’agit de connaître les objectifs d’apprentissage qui se cachent derrière les titres des séquences. Au collège, il y en a en général 4 ou 5 par séquence. Effectuer une progression en jetant des noms de séquence et une durée sur une feuille n’a pas vraiment de sens. En effet, enseigner la technique de factorisation dans la séquence « Calcul littéral » de 5e – ce n’est en général pas le cas – alourdit fortement la séquence. Il devient dans ce cas bénéfique de la partager en deux. Bref, il est fondamental de lister les objectifs d’apprentissage avant d’entamer une discussion sur les progressions, sinon il y a un gros risque que le travail d’élaboration soit superficiel.

« Quand c’est sa première ou deuxième année d’enseignement, détailler tous les objectifs par séquence, c’est un travail de titan, je suis déjà noyé... »

En fait, tu le feras au fil de l’eau les premières années, séquence après séquence. Mais, effectuer ce travail avec les collègues est plus sympa et évite moins d'angles morts. De surcroît, chacun aura appris quelque chose in fine ! C’est d’ailleurs souvent à l’occasion de ces discussions de détails qu'on découvre qu’on n’enseigne pas une notion de la même manière au sein d'un même établissement, ce qui peut avoir des répercussions sur l’apprentissage des élèves. Il y a plusieurs techniques de simplification de fractions par exemple, savez celle qui est enseignée par vos collègues suivant le niveau de classe ? Il est préférable d'accorder ses violons. Mais pas de panique, les équipes ne commencent pas le travail de de nulle part. Des listes d’objectifs d’apprentissage par séquence existent déjà dans bien des manuels où les chapitres sont structurés selon des objectifs d’apprentissage, mais aussi dans de nombreuses progressions comme celles-ci : https://www.mathscours.com/espace-enseignants. Par ailleurs, il y a également les documents officiels dont les repères annuels de progression qui peuvent aider à découper les progressions par cycle : https://eduscol.education.fr/137/reperes-annuels-de-progression-et-attendus-de-fin-d-annee-du-cp-la-3e

3e étape : Dresser la liste des séquences et décider des objectifs d’apprentissage retenus pour le niveau de classe considéré

Supposons que tu as désormais une liste de tes chapitres avec les objectifs d’apprentissage afférents. À présent, à l’aide des programmes de maths et autres documents d’accompagnement, et aussi de l’expérience collective de l’équipe de maths, tu peux découper proprement les séquences et réfléchir à l’endroit où tu les placeras dans l’année. Dans le jargon, on a tendance à parler de progression spiralée ou curriculaire, quand les chapitres sont systématiquement découpés en plusieurs séquences. Fut-un temps, avant 2008 il me semble, les progressions annuelles ne comportaient que 9 chapitres environ. Aujourd’hui, c’est plutôt 15. Des collègues optent même pour un découpage extrême, pour favoriser la mémorisation sur le long terme. Je te conseillerais quand même de commencer simplement. Si les coups de ciseaux sont trop nombreux dans tes chapitres, tu risques de perdre le fil, sans même parler de tes élèves.

On essaie également de varier les plaisirs. Je te conseille d’éviter de proposer deux séquences du même domaine à la suite. Grosso modo, il s’agit d’alterner le numérique et le géométrique.

« Je vais mettre un chapitre en fil rouge tout au long de l’année. Je le saupoudrai dans toutes les autres séquences… »

Bof, les élèves ont besoin d’un cours structuré pour apprendre. Il ne s’agit pas uniquement de comprendre quand le prof corrige l'exercice, mais bien d’apprendre (bientôt un post sur la distinction entre comprendre et apprendre). Une séquence comporte des situations d’introduction, une leçon, des exercices d’entraînement, des exercices de réinvestissement. Si les savoir-faire d’un chapitre ne sont jamais institutionnalisés, ce sera bien difficile pour une partie de la classe. Il peut bien sûr y avoir des exceptions, mais il convient de ne pas en abuser ; il est possible de traiter une notion tout au long de l’année sans qu’il y ait de leçon à son sujet, mais pas un chapitre entier. Tu peux par exemple estimer que tu vas insister en activités rapides toute l'année sur l’écriture en ligne des calculs en 6e et 5e pour préparer le calcul littéral. Mais il faut se demander s'il y a une raison didactique à ce choix. S'il n'y en a pas, c'est probablement juste une manière pour accélérer et passer sous le tapis une notion. C'est donc à éviter. C'est souvent le cas pour la géométrie dans l’espace qui est saupoudrée dans les exercices ("bah oui, dans l'exercice 15 du 3e chapitre, il y a un calcul de volume !"), et je peux te confirmer d’expérience qu’il ne restera pas grand-chose dans la tête des élèves à la fin de l’année.

4e étape : Attribuer une durée aux séquences

Prendre en compte les différents objectifs d’enseignement est essentiel. Je dirais qu’enseigner la soustraction de nombres relatifs en 5e, prend bien 3 séances pleines. Mais tu ne peux pas consacrer ce temps à tous les objectifs, sinon il faudrait 2 fois plus d’heures de maths – Oui, s’il vous plaît, s’il vous plaît… C’est l’expérience qui te souffleras le nombre d’heures à allouer à chaque objectif. Donc, si tu débutes, demande aux collègues. N’oublie pas non plus que dans une séquence, il y a l’évaluation et de multiples péripéties : la 6e2 qui va au cinéma ce lundi par exemple… Il faut donc se laisser une marge.

Décider de la durée des séquences est un jeu d'équilibre instable, puisqu’au cycle 4 ou en 2de, on court après le temps toute l’année.

« Et si je suis en retard sur ma progression ? »

Tu peux retirer le « si », on est systématiquement en retard, mais le retard doit être raisonnable. Arriver à la 4e séquence de l'année sur 15 aux fêtes de fin d’année, c’est un problème qu’il faut prendre à bras le corps. Il y aura des arbitrages à opérer. Quatre semaines sur une séquence, c’est la limite haute, c’est déjà trop.

« Mais il faut bien qu’ils comprennent… »

Au début, et même ensuite, on peut avoir du mal à passer à la suite alors qu’une partie de la classe échoue sur un objectif d'apprentissage. L’idée de persévérer est noble, mais dans la pratique, c’est intenable. Quand les objectifs d’apprentissage ne sont pas satisfaits, il faut savoir laisser reposer et reprendre plus tard. Il est préférable d’éviter l’enlisement qui est démoralisant pour les élèves et pour toi. Si une notion a du mal à passer, la remettre au programme d’une évaluation 3 mois tard par exemple et ne prendre qu’une séance pour y exercer les élèves peut avoir de bons résultats.


Je te souhaite en tous cas de bonnes progressions !


N.d.A. : Je ne le précise pas à chaque fois pour ne pas alourdir la rédaction, mais ce n'est que mon avis, hein...

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